Citadine heureuse : comment réconcilier ville et nature ?

Cécile Ledoyen se demande quel avenir pour la planète

Quitter la ville pour la campagne ? Il n’en est pas question ! Si Cécile Ledoyen adore la nature, elle n’imagine pas pour autant faire le grand saut pour s’installer au vert. C’est une citadine heureuse !

Auparavant ingénieure dans le bâtiment, Cécile s’est depuis reconvertie. En chemin, de nombreuses réflexions alliant nature et ville, et comment réconcilier les deux.

Son rêve ? Créer une cité jungle !

Cette interview est assez surprenante : on y parle reconversion, permaculture, voyages, villes, écologie, bain de forêt, bien-être

J’espère qu’elle t’aidera aussi dans ton propre cheminement !

Hello Cécile ! Peux-tu nous en dire un peu plus sur toi ?

Hello Pauline ! Je m’appelle Cécile Ledoyen, j’ai 38 ans.

J’ai créé mon activité indépendante pour répondre aux enjeux environnementaux qui changeront probablement de manière significative nos modes de vie. 

Top ! Quel a été ton déclic pour en arriver là ?

A la base, je suis ingénieure dans le bâtiment. J’ai travaillé plus de 10 ans dans l’immobilier ; j’aimais ce que je faisais mais c’était très prenant, je me déplaçais en moyenne 2 fois par semaine. J’ai ressenti plusieurs vagues d’étouffement, jusqu’à faire un mini burn out.

Ca a été un premier déclic, et l’occasion de me rappeler une promesse que je m’étais faite plus jeune, celle d’exercer un métier en rapport avec l’écologie.

Cécile Ledoyen

A peu près en même temps, j’ai vu un reportage à la télé qui racontait l’urgence climatique, à quel point nous étions au bord du précipice. Et cette interrogation : qu’est-ce que je fais, moi, pour éviter ce drame ?

Mon dernier déclic, je le dois à plusieurs voyages : le 1er, 2 semaines au Japon. Puis, un peu plus tard, 3 mois en Amérique Latine.

Entre les deux, j’avais réussi à obtenir une rupture conventionnelle de mon employeur. Il s’est montré très compréhensif quant à mon envie d’entreprendre.

Avais-tu déjà, à ce moment-là, un projet entrepreneurial en tête ?

Non, pas exactement : j’avais une direction.

Je savais que je voulais apporter davantage de bien-être en ville. C’était en lien avec ce que j’avais pu faire avant, en travaillant pour une société qui conçoit de l’hébergement pour personnes âgées.

Mais je voulais à présent le faire à ma manière.

Les voyages m’ont beaucoup aidée dans ce travail d’introspection.

Temple au Japon

Au Japon, par exemple, j’ai été émerveillée de voir qu’il était possible de concilier nature ET ville.

A Tokyo, il y a plus de 37 millions de personnes qui se côtoient au quotidien – de quoi avoir peur d’étouffer ! Et pourtant, ce n’est pas le cas. Ils entretiennent un lien très fort avec la nature ; il y a une réelle culture du respect : des autres et de son environnement.

J’ai d’ailleurs eu l’occasion de découvrir l’art du bain de forêt, le Shinrin-Yoku, durant mon séjour. Ca m’a vraiment inspirée !

Dans un tout autre genre que le Japon : l’Amérique Latine. Qu’y as-tu appris ?

C’était fou ! Je suis partie au Pérou, en Bolivie, en Argentine et à l’Ile de Pâques.

Dans les pays andins, la Pachamama, c’est-à-dire la « Terre-Mère » est au cœur de tout. Elle protège ses habitants grâce à ce qu’elle leur donne : eau, nourriture, sol, … En échange, ils lui rendent hommage, notamment via des offrandes, afin qu’elle continue ses bonnes grâces : bonnes récoltes, conditions météo favorables, etc.

J’ai donc commencé à m’intéresser à la permaculture, et je me suis vite rendu compte qu’elle pouvait s’appliquer à n’importe quel système : pas uniquement l’agriculture ! Les villes Incas ont été construites en tenant compte de ses principes.

Quant à l’Ile de Pâques, ça dépasse tout entendement : comment est-ce possible d’avoir pu construire, avec les moyens de l’époque, ces statues monumentales, les moaï ?

Quelle ingénierie !

Et de savoir leurs civilisations éteintes, comme celles des Mayas et des Incas, ne laisse clairement pas indifférente si on pense aux conséquences de la crise écologique actuelle.

Cécile Ledoyen à Cusco

Cette sensibilité écologique qu’on entend dans tes propos, l’as-tu toujours eu ?

Pour être honnête, je déteste ce mot « écologie ». Je le trouve très stigmatisant. Ce que j’aime, et qui parle à mon côté ingénieur, c’est que dans écologique, il y a logique !

Si l’on revient aux origines étymologiques, eco signifie maison, et logos, discours, qui a ensuite dérivé en logique, de l’ordre de ce qui est rationnel.

L’écologie, pour moi, serait notre manière de gérer notre maison avec bon sens, en maintenant les équilibres.

J’ai d’ailleurs découvert l’écologie au travers du bâtiment. Quand un bâtiment est jugé autonome, donc écologique, c’est qu’il a été conçu en tenant compte de son environnement. Il est en mesure d’accueillir et d’héberger des personnes et de fonctionner sans polluer. C’est donnant-donnant : on devrait construire tous nos logements ainsi ; c’est un investissement sur l’avenir !

Malheureusement, notre société a une vision trop court-termiste. La rentabilité prime avant tout. C’est d’ailleurs en partie pour cela que j’ai eu envie de me lancer à mon compte et d’entreprendre.

Qu’elle est donc l’entreprise que tu as créée ?

Pour moi, il n’était pas question de partir m’installer à la campagne pour retrouver la nature. Je ne voulais pas renoncer à la ville !

Les villes sont des lieux d’une richesse incroyable, en termes de culture, de diversité, de liberté, …

Pourquoi ne pourrait-on pas avoir les deux ?

Des villes qui facilitent et recréent du lien entre les individus ET qui offrent de réels espaces de nature. Des villes résilientes !

Mon rêve ? Ce serait de créer une cité jungle… L’union fait la force 😉

Bref, tout ça pour dire qu’initialement, l’objectif de mon entreprise était de proposer des formations pour remettre l’écologie au cœur de son logement. Je proposais également des prestations pour accompagner les individus dans l’éco-rénovation de leur habitation.

C’est ce que j’ai commencé à lancer lors de mon périple en Amérique du Sud.

Pourquoi dis-tu « initialement » ?

Parce que, quelques mois après mon retour en France, survient… le 1er confinement. Et là, patatras, tous mes clients m’appellent pour mettre leurs projets en stand-by.

Gloups.

Grosse déception.

Et en même temps… gros soulagement !

Je comprends alors que, ce qui m’anime le plus au quotidien n’est pas tant la solution (c’est-à-dire le projet de construction, clefs en main) mais l’humain. Ce que j’aime, c’est d’accompagner chaque personne dans sa transformation personnelle pour qu’il puisse lui-même mettre en place ses propres solutions.

L’impact est, à mon sens, beaucoup plus important ainsi !

De l’éco-habitation, tu as donc basculé ton activité vers de l’accompagnement individuel ?

Oui, c’est en revoyant une vidéo sur le bain de forêt que j’ai su que c’était ça que je voulais faire : allier nature et développement personnel.

Aujourd’hui, j’accompagne les (futurs) entrepreneurs à trouver leur voie et à construire sereinement leur activité professionnelle.

Le tout en maintenant un équilibre dans leur quotidien.

Parallèlement, je propose des immersions dans la nature (bains de forêt), et j’anime des ateliers DIY dédiés aux citadins pour leur permettre de vivre une vie urbaine heureuse 😊

Bain de forêt

Quelle est ton approche ? En quoi se différencie-t-elle de tout ce qui existe déjà ?

J’utilise le design en permaculture et je l’applique à l’homme.

L’observation, qui est l’un des piliers de la permaculture, est à la base pour entreprendre de manière (éco)logique, alignée avec soi. Car nous sommes notre 1ère maison, notre 1ère Terre.

L’observation de soi, de nos valeurs et de nos aspirations pour découvrir et libérer tous nos potentiels.

La nature offre aussi des clefs de compréhension de notre fonctionnement : nous sommes tous des êtres de feu, de terre, d’air ou d’eau. Chaque élément a une signification propre à chacun : j’aide mes clients à trouver leur voie et un équilibre durable et harmonieux.

Et le bain de forêt peut aider en cela ?

Forêt

Oui, car il apporte beaucoup de détente. Et de la clarté.

Quand on participe à un bain de forêt, c’est un temps pour soi, sans enjeu, mais durant lequel on pose une intention. Ca peut être un souhait ou une réponse à une question, par exemple.

S’ensuit un moment de calme où l’on se connecte profondément à la nature et à tous ses sens : le goût, l’odorat, le toucher, la vue, l’ouïe – mais aussi l’intuition, l’empathie, …

La nature devient ainsi un moyen de se connecter à sa vraie nature. Quand on est convaincu que la richesse est en nous et autour de nous, notre potentiel créateur est infini !

Tu te considères comme une « citadine heureuse ». Comment y arrives-tu ?

Logo GoodLivingConcept

C’est une question d’équilibre. Et d’ancrage – à son territoire.

Au travers de son alimentation, par exemple, en privilégiant le local et le bio. En recréant du lien, avec ses voisins, ses commerçants, des associations locales, la collectivité … En se reconnectant à la nature, en instaurant de réels moments de connexion, de pauses.

Et en s’engageant pour contribuer à un monde meilleur… en créant son entreprise ! 😉

Merci Cécile !

Ce qu’il faut retenir de l’interview de Cécile

  1. La nature est riche d’enseignements : en prenant le temps de l’observer, en se renseignant à son sujet, on peut transposer tellement de choses à notre échelle. Mais, une fois de plus, c’est logique : nous sommes aussi la nature !
  1. Rien n’est figé dans le marbre : nous sommes des êtres qui évoluent en permanence et nos projets aussi peuvent changer dans le temps. Le tout est d’agir, de faire un premier pas pour déplacer quelque chose en soi et à l’extérieur de soi.
  1. Il faut tester le bain de forêt ! Différent de la méditation, c’est une expérience (et un outil) formidable pour retrouver la part de soi « oubliée ».

Pour suivre Cécile

LinkedIn :  Cécile Ledoyen